subst. masc. Animal venimeux & reptile, long & menu, & ressemblant à l'anguille. Le Diable tenta Eve sous la figure d'un serpent. La punition du serpent fut de ramper sur la terre, & d'en manger. Il y a des serpents d'eau, qu'on nomme autrement des hydres ; des serpents de haye, que les paysans appellent anguilles de haye. Moyse fit eslever un serpent d'airain qui guerissoit les morsures des serpents. Il y a un serpent à deux testes qu'on appelle amphisbene. On tient que les dragons sont des serpents aislés. Les Anciens ont appellé serpents, tous les monstres venimeux, comme le serpent de Lerne, qui estoit l'Hydre à cent testes fabuleuses : le serpent Pithon que tua Apollon. On tient aussi pour fabuleux le basilic, qu'on appelle le Roy des serpents, qui tuë par son regard. Les serpents tous les ans changent de peau, & cette peau s'appelle dépouille de serpent. Les serpents de Calecut sont fort gros & dangereux : neantmoins on ne les oseroit tuer, à cause que les Rois & les Bramins les reverent avec grande superstition. Ils croyent que ce sont des esprits creés de Dieu pour affliger les hommes, & pour les punir de leurs pechés. F. Peyrard. Au Perou dans la contrée des Antis il y a des serpents qui ont 25. ou 30. pieds de long, & presque autant de grosseur. Ils y ont esté adorez, aussi-bien que plusieurs couleuvres, lezards, ou crapauts. En Afrique il y a des serpents qui viennent à l'heure des repas dans les maisons manger ce qu'on jette sous la table, & aprés ils s'en retournent sans faire mal. Voyage de Rasilly. Il y des serpents en l'Isle de Cuba qui ressemblent à des lezards, ou qui sont gros comme de petits chiens. On les mange, & la chair a le goust du faisan. Herrera. On dit aussi, que dans le Royaume de Congo il y a des serpents de 25. pieds de long, qui avalent tout d'un coup une brebis. On a veu avaler une fille de 18. ans à un serpent, dont on garde la peau à Batavia.

Il y a un serpent appellé coulesang, à cause que le sang coule par tous les conduits du corps à celuy qui en a esté mordu. C'est un petit serpent comme une vipere, ayant les yeux fort ardents, & la peau fort luisante. Avicenne dit qu'il a le dos marqueté de taches noires & blanches, & le col fort estroit, & la queuë fort menuë.

SERPENT POURRISSEUR, est un serpent dont parle Pausanias, qui est de couleur cendrée, ayant la teste large, le col estroit, le ventre gros, & la queuë courbée. Il chemine obliquement à la maniere des cancres, ayant des taches separées les unes des autres, riolées, piolées, c'est à dire de diverses couleurs, comme un tapis velu, qui est nommé pourrisseur, parce que la partie qu'il a morduë se pourrit incontinent avec de grandes douleurs.

Il y a un serpent marin, qui est quasi semblable au congre en grosseur & en couleur, mais plus noir & plus dangereux. Il se cache dans le sable en un clin d'oeuil, en y faisant un trou avec son museau qui est fort pointu.

Le serpent à sonnettes est un serpent tres-dangereux, qui se trouve en plusieurs endroits de l'Amerique, ainsi nommé, à cause qu'avec le bout de sa queuë il fait un bruit semblable aux sonnettes, quand on les remuë. Cet animal est assez gros, long d'environ cinq pieds, & de couleur brune meslée de jaune. Il a la langue fourchuë, les dents longues & pointuës, & il se remuë avec tant de vistesse, qu'il semble voler. Dans la Virginie on le tuë en luy presentant des feuilles de pouliot sauvage escachées qu'on attache au bout d'un grand baston fendu, qu'on appelle autrement dictame de Virginie. Voyez Mr. Glouer dans la description de la Virginie.

Plusieurs Auteurs parlent d'une pierre qu'on nomme de serpent, de la grandeur d'un double tirant un peu sur l'ovale, espaisse au milieu, & mince sur les bords. Les Indiens disent qu'elle se forme dans la teste de certains serpents : mais la verité est qu'elle se fait d'une certaine composition. Elle est souveraine contre la morsure des animaux venimeux ; car étant appliquée sur la playe, elle n'en tombe point qu'elle n'en ait attiré tout le venin. Pour la nettoyer, on la met dans du lait, où elle se descharge de tout son venin, & le lait prend alors une couleur d'apostume, ainsi que rapporte Tavernier : mais Francisco Redi dit qu'il n'a trouvé aucune vertu en cette pierre appellée cobras de cabello, l'ayant experimenté sur plusieurs mordus de viperes, qu'il n'a pû sauver. La composition s'en trouve dans le Journal d'Allemagne, qui est cité par celuy de France en 1677.

SERPENT, se dit figurément en Morale de ce qui est nuisible, meschant, dangereux. Le Diable est appellé le Serpent infernal. On dit d'un ingrat qu'on a eslevé, que c'est un serpent qu'on a nourri dans son sein ; & d'une femme maligne & medisante, que c'est un serpent, qu'elle a une langue de serpent. On dit aussi d'un miserable qui n'a point de fortune, qui rampe, que c'est un pauvre serpent.

SERPENT, est aussi un instrument de Musique qui sert de basse au cornet-à-bouquin pour soustenir un choeur de Chantres dans un grand vaisseau. Son nom vient de ce qu'il a la figure de serpent, ayant plusieurs replis pour corriger sa longueur, qui seroit sans cela de six à sept pieds. On le couvre de cuir comme le cornet, pour le renforcer. Il est composé de trois parties, de son bocal, de son col, & de sa queuë. Il a six trous par le moyen desquels on luy donne l'étenduë d'une dix-septiéme.

On dit proverbialement, C'est un serpent caché sous les fleurs, en parlant d'un desordre qu'on ne prevoyoit pas, qui arrive en quelque affaire qui paroissoit bonne. Tristan a dit dans la Mariane en parlant de la jalousie :

Serpent couvert de fleurs, dangereuse vipere.