s. m. Passage qui est au public pour aller d'un lieu à un autre. Les Tresoriers de France sont ceux qui ont soin des grands chemins, comme Grands Voyers. Les grands chemins, ou proprement chemins de charroy, selon la Coûtume de Clermont, sont des chemins de trente pieds de large ; & les chemins royaux en ont soixante-quatre, & dans les forests soixante. Berger dans son livre des grands chemins de l'Empire, dit que ce mot est du vieux François. La Guide des chemins enseigne les routes des grands chemins, les postes & leur distance. On dit, Passer son chemin, se mettre en chemin. Ce mot vient à caminis. Quelques-uns le font venir de caymum, qu'ils disent signifier la même chose. D'autres le tirent du Latin semita, & disent que chemin a été dit comme semin.

On appelle chemin du halage, un chemin de 24. pieds de large, que les Riverains des rivieres navigables sont obligez de laisser sur les bords pour le passage des chevaux qui halent ou tirent les bateaux.

On appelle chemin de traverse, un chemin détourné, ou qui n'est pas sur la route des grandes villes, mais qui va d'un bourg ou d'un village à un autre. Un chemin ferré, celuy qui est pavé, ou dont le fonds est dur & solide, de roche, de pierre. Chemin de velours, celuy où il y a de l'herbe, qui est sur une pelouse. Chemin creux ou cavin, qui est enfoncé au dessous du rez de chaussée. Chemin fourchu, celuy qui se divise pour aller en divers endroits. Chemin difficile, qui est aspre, raboteux, ou qui est malaisé à tenir pour être coupé en plusieurs endroits. Chemin bas, qui est dans la vallée. Chemin haut, qui est sur la colline. Chemin passant. Chemin frayé. Une journée de chemin, c'est dix lieuës. Une heure de chemin, c'est une lieuë.

CHEMIN, se dit aussi d'une route qui n'est pas precisément marquée, & qu'on prend de soy-même. Il a pris son chemin à travers les terres, les bois, les prez, pour prendre le plus court. Vasco de Gama a trouvé un nouveau chemin pour aller aux Indes par l'Ocean. Dedale se fit un nouveau chemin dans l'air pour sortir du labyrinthe. Les eaux & les vapeurs sousterraines se font des chemins qui nous sont inconnus.

CHEMIN COUVERT, en termes de Guerre, est le corridor qui est sur la contrescarpe, & qui est couvert de son parapet qui regne tout autour de la place. Sa largeur est de trois à quatre toises.

CHEMIN DES RONDES, est le chemin qui est sur la muraille entre son parapet & le rempart.

Les Maçons appellent aussi les chemins des carrieres, lors qu'on y fait quelques puits, ou quelques ouvertures pour en tirer la pierre.

Les Courtiers & Tonneliers qui sont commis pour décharger le vin sur les ports de Paris, appellent chemin, une suitte de chantiers ou de grosses solives sur lesquelles ils roulent les tonneaux du bateau jusqu'à terre, car ils n'osent se servir de celuy qu'ont fait les Plancheieurs pour entrer dans les bateaux.

CHEMIN DE ST. JACQUES, est un nom que le peuple a donné à une trace blanche qui paroist dans le Ciel, que les Anciens appelloient la Voye lactée, ou le chemin des Dieux, & qu'on a découvert être un nombre infini de petites estoiles qu'on n'apperçoit qu'avec les lunettes. Elles font une sombre lueur qui cause cette apparence.

CHEMIN, se dit figurément en choses morales, des voyes, des dispositions, des moyens qu'on a pour parvenir à quelques fins. Les Anciens nous ont monstré le chemin, nous ont frayé le chemin pour devenir sçavants. ce Predicateur prend le vray chemin pour parvenir aux Prelatures. On dit aussi, Couper chemin à une maladie, à un procés, pour dire, la prevenir, ou en empêcher le cours. On dit en ce sens, qu'on a mis un homme en beau chemin, qu'on luy a applani le chemin, pour dire, qu'on luy a levé les obstacles, les difficultez : qu'il s'est arresté, qu'il est demeuré en beau chemin, pour dire, qu'il abandonne un dessein, lors que les principaux obstacles sont levez. On dit, qu'une affaire est en bon chemin, pour dire, qu'elle est en bon train, en passe de reüssir. On dit encore en ce même sens, qu'un homme est dans le bon chemin, dans le chemin de salut, quand il est vertueux : & au contraire, qu'il est dans le chemin de perdition, dans le chemin de la greve, qu'il prend le chemin de l'hospital, pour dire, qu'il est vicieux, qu'il se ruine.

CHEMIN, en ce sens signifie aussi, Bon exemple. Le Sauveur nous a monstré le chemin de souffrir, de bien vivre. Ciceron nous a monstré le chemin pour devenir éloquents.

CHEMIN, se dit adverbialement. Chemin faisant, pour dire, Par occasion. Tout d'un chemin, pour dire, Tout d'un train, en même temps.

CHEMIN, se dit proverbialement en plusieurs phrases. On dit, qu'un homme a pris le chemin de l'école, ou des écoliers, quand il a pris le plus long. On dit d'une chose longue & estroite, que c'est le chemin de Ville-Juifve, long boyau. Ce nom luy vient d'une maison seule qui est sur le grand chemin, où loge la poste, qu'on appelle long boyau. On dit, qu'un homme est toûjours par voye & par chemin, lors qu'il n'est jamais au logis, qu'on le fait toûjours aller deçà & delà. On dit aussi aux valets qui grondent quand on les envoye quelque part, Tandis que vous irez & viendrez, les chemins ne seront pas sans vous. On appelle le grand chemin des vaches, les chemins où on va par terre. On dit aussi, Bonne terre, méchant chemin, parce que les bonnes terres qui sont grasses retiennent l'eau. On dit, qu'en tout pays il y a une lieuë de méchant chemin, pour dire, qu'il n'y a point d'affaire où on ne trouve des difficultez. On dit aussi, A chemin battu il ne croist point d'herbe, pour dire, qu'il n'y a pas grand profit à faire dans un trafic connu de tout le monde. On dit aussi, Il n'en faut point aller à quatre chemins, pour dire, Il en faut passer par là. On dit aussi, Tous chemins vont à Rome, ou tous chemins vont à la ville, pour dire, qu'on peut parvenir à une même fin par divers moyens, arriver en un même lieu par divers endroits. On dit aussi en menaçant, Je le meneray par un chemin où il n'y aura point de pierres, pour dire, Je le feray marcher droit, je le poursuivray avec grande diligence : ou comme veulent quelques-uns, c'est à dire, Je le traitteray avec un tel excés de rigueur, que tout moyen de se deffendre luy sera osté ; car les pierres sont les armes de ceux qui manquent de toute autre deffense. On dit aussi en menaçant, Il me trouvera toûjours en son chemin, pour dire, Je luy feray toûjours des obstacles en toutes les affaires qu'il entreprendra. On appelle le chemin de Paradis, un chemin estroit, un defilé où on ne va qu'un à un. On dit, qu'un homme va son grand chemin, va son droit chemin, pour dire, qu'il agit franchement, & sans user d'aucune finesse ni supercherie.