Marque qu'on fait à quelque feuillet ou passage d'un Livre pour le retrouver au besoin. J'ay leu ce Livre, & j'ay fait des nottes avec un crayon, avec des coups d'ongle. On met un hic, ou une notte à la marge d'un contract, pour en remarquer la clause decisive, ou importante.

NOTTE, est aussi une remarque ou explication qu'on met à la marge, ou au bas de la page d'un Livre, d'un Escrit, pour en faciliter l'intelligence. Le Textuaire de droit avec les Nottes de Godefroy est fort estimé. Les Nottes de du Moulin sur la Coustume de Paris. Les Nottes de Cujas, &c. Cette Bible est imprimée avec des nottes marginales.

NOTTE, se dit aussi de ce qui marque quelque defaut, ou imperfection. Dans un Dictionaire on doit mettre une notte à un mot, quand il est vieux, ou particulier à quelque art ou science. Quand il est dans l'usage commun, il n'y faut point de notte. Cette fille a espousé un honneste homme, mais il est bastard, c'est une grande notte. Quand quelqu'un est pendu, c'est une notte pour toute sa famille. On appelle aussi notte d'infamie, celle dont une personne est marquée par sa profession, ou par quelque jugement. Le mestier de Comedien porte avec soy une notte d'Infamie. Toute condamnation à peine afflictive emporte notte d'infamie.

NOTTES, sont aussi des caracteres ou abbreviations qu'on fait, soit pour escrire promptement, soit pour signifier quelque chose : d'où vient que les Anciens ont appellé les Notaires Eursores, quia notis verba cursim expediebant. Herigone a fait cinq Tomes d'un Cours de Mathemathiques en Nottes, qu'il pretend estre une Langue Universelle, & pouvoir estre entenduës de tout le monde. Les Jurisconsultes ont des nottes, comme §, Paragraphe ; ff, digestis ; Ë Extra. Scto. ; senatusconsulto. Les Romains avoient des nottes pour leurs inscriptions, S. P. Q. R. &c. Senatus, Populusque Romanus. P. P. Pater Patriae. Ce sont ces nottes anciennes qu'a expliqué Valerius probus. Les Chymistes ont leurs nottes, a a a, amalgamer. s. s. s. stratum superstratum. L'Algebre a aussi ses notes expliquées à Algebre. Presque tous les autres Arts en ont pareillement.

Les Medecins, Chirurgiens & Apothicaires se servent de ces nottes ou caracteres pour marquer le poids & les doses dans leurs Ordonnances. La livre . une onze . deux onces & ainsi jusqu'à la demi livre, dont voicy la marque . une dragme . deux dragmes . de même jusqu'à huit, le scrupule . le grain g.

Paul Diacre dit que les nottes furent inventées par Ennius, qui en fit le premier onze cens. Tullius Tyro Affranchi de Ciceron, Philargyrus Famius, & Aquila affranchi de Mecenas y en adjousterent beaucoup d'autres. Enfin Lucius Armaeus Senexa les compila, les mit en ordre, & en augmenta le nombre jusqu'à cinq mille. Voyez Notaire.

NOTTE, en termes de Musique, se dit des caracteres qui marquent les tons, les élevations ou les abaissements de la voix, & ses mouvements vistes ou lents, enfin toutes les variations qui y doivent faire de l'harmonie.

La notte maxime est figurée par un quarré long avec une queuë. Elle vaut 8. meures, quoy que le Pere Mersennet la fasse de 12. La longue est un quarré avec une queuë, qui en vaut la moitié ou 4. mesures. La breve est un quarré sans queuë, qui vaut deux mesures. La semibreve est un quarré sans queuë qui est posé sur ses angles ou en losenge, qui vaut une mesure ou le lever & le baisser de la main. La minime est une losenge avec une queuë, qui vaut la moitié d'une mesure ; la noire a la même figure, mais elle est pochée, & vaut un quart de mesure. La crochuë est la même figure avec un croc par en bas, qui vaut un huitiéme de mesure ; & la double crochuë un seiziesme. Les Imprimeurs appellent nottes liées, ou doubles, celles qui sont fonduës ensemble.

Il y a aussi des nottes ou caracteres pour signifier les pauses, les repos ou silences qui marquent qu'il faut se taire aussi long-temps qu'on est à chanter la notte qui precede. Elles se font avec des points ou des lignes qui traversent d'un reglet à l'autre.

Les Grecs faisoient leurs notes de Musique avec des lettres simples ou doublées, droites ou renversées, comme on prouve par les Livres de Bacchius, d'Alipius, de Porphire & de Boëce.

On dit en ce sens, qu'un homme chante sur la notte, pour dire, à livre ouvert sur un livre note ; ou qu'il fait des accords sur la notte, sans avoir estudié ce qu'il chante.

NOTTE, se dit aussi pour signifier le ton. Il y a huit nottes en Musique, qu'on appelle ut, re. mi, fa, sol, la, si. Les six premieres ont esté inventées en l'an 1024. par Guy Aretin Moine Benedictin, qui les trouva à Pompose dans le Duché de Ferrare. Il inventa aussi outre les nottes, les lignes, les lettres, ou clefs, le B quarre & le B mol. Ce fut du temps du Pape Jean XX. lequel les reçût avec si grand applaudissement, qu'il commanda de mettre cette maniere de chanter en usage. Aussi est-elle si facile, qu'on apprend plus de Musique en un jour avec cette methode, qu'on ne faisoit autrefois en un an avec celle des Grecs, dont on s'estoit servi jusqu'alors. Il y avoit plusieurs autres manieres en Occident pour noter le chant, avant qu'on eust inventé ce systeme, comme il se voit dans un Livre de la pratique du plein chant. Il intitula Micrologue, le Livre où il publia cette invention, Aretin a pris les notes ut, re, mi, fa, sol, la, de l'Hymne des Vespres de St. Jean Baptiste, ut queant laxis, &c. Denis d'Halicarnasse témoigne que les Egyptiens se servoient de sept particules pour exprimer les divers tons de Musique long-temps avant Aretin.

La septiéme notte a esté inventée de nos jours par le Maire, qui est un si, qui differe d'un demi ton du la. Il sert à éviter la difficulté des muances qui estoient restées dans la gamme de Guy Aretin. Cette syllabe est plus haute d'un demi-ton que le la ; & quand on voudra avoir un ton entier, on mettra une diese au dessous.

On peut faire 720. varietez des six nottes de Musique, sans repeter la même deux fois ; & on peut faire 40320. airs differens des nottes de chaque octave. Il y a des Organistes qui font 32. nottes dans la mesure binaire qui dure seulement une seconde de minute.

NOTTE, se dit proverbialement en ces phrases. On dit d'un Menestrier, qu'il ne sçait qu'une notte, qu'il n'aura qu'un double, pour dire, qu'il ne sçait qu'une chanson. On dit aussi, qu'un homme change de notte, quand il parle d'une autre maniere qu'il n'avoit fait, quand il supplie, au lieu de menacer. On dit aussi de celuy qui ne sçait rien de la matiere dont on l'interroge ; qu'il n'en sçait notte, qu'il n'en a pas retenu une notte.