s. m. Diminutif de Carré, qui se dit d'une figure qui a quatre costez, quoy qu'ils ne soient pas égaux, ni à angles droits, comme un carreau de vitres qui est quelquefois en losange. On dit, une estoffe à petits carreaux. plier du linge par petits carreaux. les Jardiniers divisent leurs parterres ou jardins en carreaux. il y a un beau carreau de tulippes, c'est à dire, une planche, qu'il estime dix mille francs. Ce mot a été fait de quadrellum. Menage.

CARREAU, signifie aussi le pavé des chambres, des sales, des Eglises, de quelque matiere & figure qu'il puisse estre. Il y a des carreaux de marbre, de poterie, de fayence ; il y en a de quarrez, d'hexagones, &c.

En ce sens on dit au jeu de Paume, une chasse a trois carreaux, à dix carreaux, lors qu'une balle est tombée sur le troisiéme ou le dixiéme carreau, & qu'elle fait chasse.

CARREAU, se dit aussi du pavé de la ruë, ou même de la terre qui est hors les maisons. On a mis ses meubles sur le carreau, c'est à dire, hors du logis. en cette batterie il est demeuré deux hommes sur le carreau, pour dire, ils ont été couchez par terre. on l'a jetté sur le carreau. il a été obligé de coucher sur le carreau, c'est à dire, dehors, sur le pavé, sur la terre.

CARREAU, signifie aussi, un grand oreiller ou coussin quarré de velours, que les Dames & les Evêques se font porter à l'Eglise pour se mettre à genoux plus commodément : ce qui est aussi une marque de qualité. C'est une Dame à carreau, on luy porte le carreau. les femmes des gens d'épée ont des carreaux avec des galons d'argent. Celles des gens de robbe en ont seulement avec des broderies de soye.

On a aussi des carreaux dans les chambres pour s'asseoir ou s'accouder. Les Cavaliers étoient à ce bal au pied des Dames sur des carreaux. Un porte-carreau, est un petit meuble de bois qui n'a autres pieds que des pommes tournées, sur lequel on met des piles de carreaux.

CARREAUX, en termes de Marine, sont des rebords ou bandes de bois qui regnent par dehors sur le bordage du vaisseau en guise d'un cordon, qui lie & distingue les tillacs, & particulierement ceux qui sont au dessus de l'eau. On les appelle autrement lisses, cintes, ou precintes, ou chaintes.

CARREAU, en termes de Maçon, est une pierre de taille de mediocre grosseur, dont il en faut deux ou trois pour faire une voye. Quand il n'y en a qu'un, on l'appelle quartier.

On appelloit aussi autrefois carreaux, de grosses pierres qu'on jettoit dans les villes assiegées avec des mangonneaux, qui pesoient quelquefois la charge d'un char qu'on nommoit carrus ; ce qui leur fit donner ce nom, aussibien qu'à carriere, qui étoit le lieu d'où on les tiroit.

CARREAU, est aussi une arme de trait, ou flesche quarrée, qu'on tire avec une arbaleste. C'est par comparaison qu'on appelle le carreau de la foudre, le trait ou la pierre qu'on croist être dans la foudre, qui blesse & qui tuë. On a dit autrefois Gareaux.

CARREAU, chez les Tailleurs, se dit d'un fer plat & pointu par un bout, qu'on fait chauffer, & qu'on passe sur les coutures pour applattir les lisieres.

CARREAU, chez les Marchands de poisson, se dit des brochets qui sont les plus gros, qu'ils appellent un brochet carreau : ce sont ceux dont on fait des presents.

CARREAUX, se dit aussi chez les Artisans, des grosses limes. Les gros carreaux & gros demi-carreaux servent à ébaucher le fer. Les carreaux doux & demi-carreaux sont des limes douces qui servent à le polir.

CARREAU, se dit aussi au jeu de cartes, des figures rouges marquées en losange. Le Roy, la Dame de carreau. il a une quinte major en carreau. On appelle le jeu du franc du carreau, un jeu où on jette une piece de monnoye en guise de palet sur un quarré qu'on a tracé en terre, & divisé par ses diametres & diagonales : celuy qui met sur les lignes gagne quelque avantage.

On dit proverbialement & bassement d'un homme qui a vomi, qu'il a jetté du coeur sur du carreau. On dit aussi pour mespriser quelqu'un, que c'est un valet de carreau.

CARREAU, en termes de Monnoyes, se dit des pieces d'or ou d'argent qu'on taille pour fabriquer les especes. La premiere façon qu'on donne en la fabrique des monnoyes au marteau, est de tailler carreaux, c'est à dire, couper les lingots ou lames d'or ou d'argent en petits morceaux quarrez avec de grandes cisoires. La seconde façon est de battre ou frapper carreaux ; ce qui se fait par un habile ouvrier sur une enclume oblongue qui est sur son banc dans sa fournaise. La troisiéme façon est de recuire carreaux : & la quatriéme de les ajuster, approcher, ou rebaiser pour les rendre de leur juste poids, & ensuite les rechausser & flatir, eslaizer & boicer, qui sont les cinq, six, sept & huitiéme façons qu'on leur donne, aprés lesquelles les carreaux s'appellent flans ou especes.