v. act. & neut. Ouvrir la veine avec une lancette pour tirer du corps le sang corrompu, ou qui peche par excés. Les Medecins de Paris font trop saigner. Ce Chirurgien est fort expert à saigner. On l'a saigné au bras, à la cephalique, à la mediane ; on l'a saigné le pied en l'eau.

SAIGNER, au neutre signifie, Respandre du sang. On luy a donné un coup de poing sur le nez, il saigne comme un boeuf. Quand on s'est picqué ou couppé, il faut faire saigner la playe. On luy a donné mille coups, il saigne de tous costez. C'est une erreur populaire de croire que les playes saignent en presence d'un meurtrier.

SAIGNER, se dit encore en parlant d'un marais, d'un fossé, d'une riviere, quand on fait des canaux pour les vuider, dessecher ou affoiblir, pour en faire couler les eaux dans un lieu plus bas.

SAIGNER, se dit figurément du coeur, quand il est esmeu d'une grande tendresse, ou compassion. Le coeur me saigne, quand je voy la misere du peuple, de ce pauvre homme qui n'a pas du pain ; quand je voy opprimer un innocent.

SAIGNER, se dit aussi en choses morales, & en parlant des corps politiques. Le meurtre du Duc de Bourgogne est une playe qui a saigné long-temps, qui a eu de fascheuses suites. L'Heresie a fait bien des maux dans l'Europe, la playe saigne encore.

SAIGNER, signifie aussi, Tirer de l'argent de la bourse de quelqu'un, ou par force, ou volontairement. Ce Partisan a été rudement saigné à la Chambre de Justice. Il faut que chacun se saigne pour subvenir aux necessités de l'Estat. Un debiteur fait fort bien de se saigner, de faire un effort, pour contenter ses creanciers.

On dit proverbialement, qu'un homme saigne du nez, lors qu'il manque de resolution, quand il faut executer quelque entreprise, par timidité, quoy qu'il eût promis de le faire. On dit aussi d'une pistole qui paroist rognée depuis peu, qu'elle saigne encore.