s. m. Piece de fer dont s'arme le talon d'un Cavalier qui veut monter à cheval. Il est composé de deux branches qui embrassent le talon du Cavalier, & d'une pointe rose ou mollette faite en forme d'estoille, qui advance par derriere pour piquer le cheval. Il est attaché à la botte par deux pieces de cuir qu'on appelle le dessus & le dessous de l'esperon. Il faut donner un coup d'esperon jusques-là, pour dire, y aller en diligence. Ce mot vient de sphaerula, selon Nicod, à cause de sa ressemblance avec la mollette. Menage le derive de l'Italien sperone, qui a été fait de l'Alleman sporen, ou sporn. Les Anglois disent a sparle ; & en basse Latinité on a dit sporones.

On dit au Manege, qu'un cheval n'a point d'esperon, pour dire, qu'il n'y est pas fort sensible ; & au contraire, qu'il a l'esperon delicat & fin, quand il le sent bien. On dit qu'il fuit l'esperon, pour dire, qu'il y obeït ; qu'il connoist l'esperon, qu'il s'attache à l'esperon, qu'il se manie aisément avec l'esperon. C'estoit une des ceremonies en faisant les Chevaliers, de leur chausser les esperons. Quand on rend la foy & hommage, il faut quitter ses esperons. Les esperons d'or appartenoient particulierement aux Chevaliers, & ceux d'argent aux Escuyers.

ESPERON, se dit aussi d'une espece de corne qui vient en pointe aux jambes des cocqs & des chiens.

ESPERON, en termes de Guerre, se dit d'une fortification en angle saillant, qui se fait ou au milieu des courtines, ou au devant des portes, ou sur les bords des rivieres, pour empêcher qu'on n'entre dans la place par là. On le dit aussi de ces pointes de pierre qu'on met au devant des piles des ponts pour les conserver, & pour fendre l'eau, & des arcsboutans ou contremurs qu'on fait pour fortifier les murailles qui soustiennent des terrasses.

ESPERON, se dit aussi de la prouë & de la pointe des vaisseaux & galeres, qui fait une grande saillie & avance en mer. On l'appelle aussi cap, avantage, & poulaine. C'est ce que les Latins appelloient rostrum, ou calcar galeae.

ESPERON, est aussi une marque de vieillesse qui se voit au coin de l'oeuil, & se fait par quelques rides qui representent une mollette d'esperon, tant aux hommes, qu'aux chevaux.

On dit proverbialement, Chausser les esperons à quelqu'un, pour dire, le mettre en fuite, & le poursuivre : de là vient qu'on dit la Journée des esperons. Ce fut une bataille donnée au mois d'Aoust 1513. sous Louïs XII. Il y en a eu une autre en la vie de Philippes le Bel de l'an 1314. Ce fut une deffaite signalée qui se fit à Courtray, où on compta jusqu'à 12000. Chevaliers morts, en telle sorte que pour la quantité d'esperons dorez que les Flamans remporterent, on la nomma la Journée des esperons.

On dit aussi d'un homme stupide & lent, qu'il n'a ni bouche, ni esperon, qu'il n'est bon à rien. On dit d'un homme ambitieux, amateur de la gloire, qu'il a plus besoin de bride que d'esperon.