v. actif. Fournir les aliments necessaires pour entretenir la vie. Dieu a crée les fruits de la terre pour nourrir l'homme & les animaux. Cet homme a une grande famille à nourrir. Il nourrit tant de valets, de chiens, de chevaux, d'oiseaux. C'est une belle charité de nourrir des pauvres, des orphelins. Diogene s'estonnoit de ce qu'il nourrissoit des parasites : c'estoient des souris. Quand on fait mettre quelqu'un prisonnier pour dettes, on est obligé de le nourrir, s'il le demande.

NOURRIR, se dit aussi en parlant de l'aliment qui se convertit en la substance de l'animal, on dit la plante, la chair nourrit la chair. Cet homme se nourrit bien, il fait bonne chere, tout ce qu'il mange luy profite. Il est gras & bien nourry. L'enfant se nourrit dans le ventre de la mere. Le poulet se nourrit du jaune de l'oeuf. Les insectes la plus-part se nourrissent de limon.

NOURRIR, signifie aussi, Donner à teter à un enfant, l'eslever jusqu'à un certain âge, une bonne mere doit elle-même nourrir son enfant. Les animaux nourrissent bien leurs petits. La nourrice est devenuë grosse, elle n'a pû achever de nourrir cet enfant. Cette femme n'a pû nourrir, eslever d'enfans, ils sont tous morts en bas âge.

NOURRIR, signifie encore, Eslever des bestiaux pour le mesnage de la campagne, pour en trafiquer. Ce pays est abondant en pasturages, on y nourrit bien des boeufs, des moutons, des chevaux. Le profit de cette ferme consiste à nourrir, à faire des nourritures. Dans les montagnes on nourrit des chevres ; dans les pays chauds des vers à soye. La basse-cour nourrit le Gentilhomme.

NOURRIR, se dit aussi des plantes & des arbres. Dans les terres seches les arbres ne trouvent pas de quoy se nourrir. Le fumier, le terreau, servent à nourrir, à faire profiter les arbres. Il y a bien des plantes qu'on ne peut nourrir ni eslever dans les pays froids. Dans une terre grasse, le bled qui y croist est bien nourry, le grain y est plus gros. Les melons ne vaudront rien cette année, ils ont esté nourris d'eau, il a trop pleu. Voilà des fruits gros & bien nourris.

NOURRIR, se dit aussi des choses inanimées. On a amené plusieurs ruisseaux & estangs pour nourrir le canal de Languedoc : pour l'entretenir. Il faut jetter du bois dans le feu pour le nourrir. Quelques-uns tiennent que l'aimant a besoin de nourrir, qu'il le faut armer ou mettre dans la limaille de fer. On dit aussi dans l'Escriture, qu'un caractere est bien nourry, lors qu'il est bien chargé d'ancre, qu'il n'est point affamé. On dit en Pharmacie, Nourrir la litharge, ou une autre semblable drogue, quand en la broyant continuellement dans le mortier, on l'arrose peu à peu d'huile ou de vinaigre sans la noyer, jusqu'à ce qu'elle ait pris la consistance qu'on luy veut donner.

NOURRIR, se dit aussi en parlant des pays qui abondent en vivres, qui en fournissent aux autres, ou des rivieres qui servent à les y transporter. La Seine & la Marne nourrissent Paris ; la Beauce le nourrit de grains. Le Berry est sec, il n'a de bleds que pour se nourrir. On dit aussi, que l'Afrique nourrit des monstres ; que la mer nourrit des baleines, &c.

NOURRIR, se dit figurement en choses morales, L'esprit de l'homme est si foible, qu'il se nourrit d'imaginations, de fumée, de vaines esperances. L'amour se nourrit, s'entretient par des faveurs. Cette maison nourrit une haine immortelle contre celle-là. Le motif qu'on met dans toutes les transactions est pour nourrir paix & amitié entre les parties.

NOURRIR, signifie encore, eslever, instruire. Il faut nourrir les enfans dans la crainte de Dieu, dans l'amour des lettres & de la vertu. Ce Gentilhomme a esté bien eslevé, bien nourry, il a esté nourry à la Cour ; il a toûjours esté nourry à la guerre, aux armes, à l'estude. Il a esté nourri Page chez un tel Seigneur.

NOURRIR, se dit proverbialement en ces phrases, une besace bien promenée nourrit son maistre. On dit en ce même sens, il n'y a point si petit mestier qui ne nourrisse son maistre. On dit aussi à celuy qui bat un enfant, qu'il n'a pas envie de le nourrir. On dit aussi, qu'on a nourry un Serpent dans son sein, quand on a eslevé un ingrat, qui rend le mal pour le bien, qui tasche à perdre son bienfaiteur.