v. act. Mettre une chose sur une autre, au devant d'une autre. Ce mot a divers usages suivant les diverses applications. Il vient de cooperire. Nicod.

COUVRIR, se dit premierement des choses qu'on met sur les autres pour les conserver, pour les garentir des injures de l'air. Couvrir une maison, une Eglise, c'est y mettre le toit, de peur qu'il n'y pleuve, la couvrir de plomb, d'ardoise, de tuille, de bardeau, de chaume. On couvre de paille & de recouppes de pierre les murs imparfaits dans les atteliers pour les garentir de la gelée. Les Jardiniers couvrent de paillassons leurs couches de fleurs de melons à même fin. On couvre le feu de cendres pour le conserver.

COUVRIR, signifie aussi, Cacher, empêcher qu'on ne voye. Adam aprés sa faute se vit obligé de couvrir sa nudité. On couvre les Saints de voiles pendant le Caresme. Il a enfouï son tresor, il l'a couvert de terre. Le Ciel se couvrit de nuages, & nous menaça de tempeste.

COUVRIR, se dit aussi de ce qu'on met sur un autre corps pour le tenir chaudement ou proprement. Il faut bien couvrir ce malade durant son frisson. Il faut couvrir ce plat, cette marmite, pour les faire plustost bouillir. Le Prestre couvre son calice avec le volet. Couvrez ce pot de peur des mousches. En ce sens on dit, Se couvrir, pour dire, Mettre son chapeau sur sa teste. Les Grands d'Espagne se couvrent devant le Roy. Victorio Siri dans son IV. Vol. dit que jusqu'au regne de Louïs XII. on se Couvroit devant les Rois de France, & qu'on se decouvroit seulement quand on entroit dans leur chambre, quand ils parloient à quelqu'un, ou quand ils beuvoient à table ; car alors tout le monde mettoit chapeau bas, & aprés on le remettoit sur sa teste avec une profonde reverence.

COUVRIR, signifie aussi, Mettre la nappe, & servir sur table. Il faut appeller le Maistre d'Hostel qu'il fasse couvrir. Ce Prelat fait toûjours bien couvrir sa table, on y sert bien des plats.

COUVRIR, se dit encore de ce qui orne la chose sur laquelle on l'applique. Il a fait couvrir tous ses Livres de maroquin, tous ses sieges de velours ; couvrir son plancher d'un riche tapis ; couvrir un habit de galons d'or, de broderie. Au printemps la terre se couvre de fleurs.

COUVRIR, en termes de Guerre, signifie, Mettre quelque corps au devant de soy pour se deffendre des coups de l'ennemy, ou luy faire quelque obstacle qui l'empesche d'approcher. Dans les villes on se couvre par des parapets, des ramparts, des murailles. Ce ravelin, cet ouvrage à corne couvroit toute la courtine. Les casemates se couvroient autrefois par des orillons. Dans les campements on se couvre d'un bois, d'une riviere, d'un rideau. Dans les sieges on se couvre de gabions, de chandeliers, de mantelets, d'espaulements. On dit aussi d'une place forte, qu'elle couvre tout un pays, toute une frontiere. Un combattant se couvre de son bouclier, de son espée.

COUVRIR, se dit aussi hyperboliquement de ce qui est en abondance, en quantité sur un même lieu. Xerxés couvrit la terre de soldats, la mer de vaisseaux. Ce Cavalier revint du combat tout couvert de sang & de poussiere. Un cheval en passant couvrit son habit de bouë. Ce malade avoit le corps couvert de pourpre.

En termes de Palais, Couvrir signifie, Apporter quelque deffense, quelque exemption peremptoire. La fin de non recevoir, la prescription vous couvre de la demande de vostre partie. Un arrest de compte, une transaction couvre les actions & demandes qu'on pourroit faire pour le passé. Un mariage subsequent couvre le deffaut de naissance des enfants, & les rend legitimes. Les faux & doubles emplois, les erreurs de calcul ne se couvrent jamais ni par arrests, ni par transactions. Quand on apporte de meschantes excuses, on dit qu'on se couvre d'un sac mouillé. On dit, Quand les Medecins font des fautes, la terre les couvre, c'est à dire, qu'ils n'en sont point recherchés.

En Jurisprudence feodale on appelle, Couvrir un fief ou un arriere-fief, quand le vassal a fait la foy & hommage, ou a offert de la faire pour l'ouverture ou mutation du fief advenu, & pour en prevenir & empêcher la saisie.

COUVRIR, signifie aussi, Mettre de l'argent sur une carte, ou tenir ce qu'un autre a mis dessus. On le dit encore d'une carte qu'on met sur une autre en joüant les cartes. On dit aussi, Couvrir la jouë, pour dire, Donner un soufflet.

COUVRIR, se dit aussi des animaux qui s'accouplent pour la generation. On choisit de beaux estalons pour couvrir les cavales dans les haras. Cette espagneule a été couverte d'un fort beau chien.

COUVRIR, se dit figurément en choses morales. Une lasche action couvre un homme d'infamie. Ce Capitaine se couvrit d'une honte éternelle par sa revolte. Ce Conquerant revint triomphant, tout couvert de gloire, de lauriers.

COUVRIR, signifie aussi, Cacher, se desguiser. Les hypocrites se couvrent du manteau de devotion pour cacher leurs crimes, pour couvrir leurs deffauts. Cet homme est fort adroit, il sçait bien couvrir son jeu, ses desseins. Cet amant est fort discret, il a bien couvert jusqu'icy sa passion.