s. m. Liqueur qui est tirée du jus des raisins, & qui enyvre ceux qui en boivent trop. Le vin rejouït le coeur de l'homme. Un muid de vin mesure de Paris contient quatorze-vingt pintes. Les gens sages trempent leur vin. Les yvrognes boivent leur vin pur.

Le vin est souvent distingué par ses façons. Le vin doux, est celuy qui n'a point encore bouilli. Le vin bourru, est celuy qu'on a empêché de bouillir, qu'on a jetté dans l'eau froide. Le vin cuvé, est le vin fait qu'on a laissé bouillir dans la cuve. Les vins sont differents par les differentes cuvées.

VIN, est encore distingué par ses qualités & par son terroir. Vin Grec, de Falerne, de Schiras en Perse qui est fort exquis. Le vin François de Bourgogne, de Champagne. Le vin du Rhin ; du vin blanc, clairet, rosé ; du vin gris ; du vin sec, par opposition à vin gras ; du vin fin ; du vin droit ; du vin de mere goutte, opposé à un vin de pressurage ; du vin de bouche, qu'on sert au Roy, ou à la table des Grands Seigneurs ; du vin du commun ; du vin fumeux, puissant, du casse-poitrine, ou casse-teste ; du ginguet, du vin qui a peu de force ; du vin verd, ou verdaut, qui n'est pas en sa boite ; du vin de cerneaux, ou d'arriere saison ; du vin de deux, de trois feuilles, de deux ou trois ans ; du vin qui est à la barre, ou au bas ; du vin poussé, qui a bouilli en esté, aigre, &c. du vin passé ; du vin louche, trouble, rassis, &c. du gros vin, dont on frotte les jambes des chevaux ; du vin en perce, qui est entamé. Du petit vin, ou du vin de dépense pour les valets, est celuy où on a mis de l'eau, qu'on appelle autrement boite ou beuvande. Les Medecins l'appellent adynamum.

Galien a escrit qu'il y a du vin qui nourrit autant que la chair de porc, quoy qu'elle soit la nourriture la plus solide, & pour cette raison la viande ordinaire des Athletes.

Pline dit que Staphilus fut le premier qui trempa son vin, & qui le tempera avec de l'eau. On a fait à ce propos une fable, que Bacchus ayant esté frappé d'un coup de foudre, & estant tout en feu, fut promptement jetté dans le bain des Nymphes pour esteindre la flamme qui le consumoit. Mais Athenée donne à Amphiction Roy d'Athenes la gloire d'avoir mis le premier de l'eau dans son vin.

VIN DE LIQUEUR, est un vin doux & piquant qu'on boit par ragoust à la fin du repas, & qu'on ne boit point à l'ordinaire, comme le vin d'Espagne, de Canarie, vin de Coindrieux, muscat de St. Laurens, de la Ciutad, &c.

On appelle aussi vin de palme, celui qui se fait de jus de palmier. Les Orientaux ne boivent gueres que du vin de palme, mais ce vin n'est point de garde : en trois ou quatre jours il s'aigrit. Du vin de prunelles, c'est celui qui se fait de vignes sauvages.

VIN, se dit aussi de celui qui est mixtionné. Le vin de malvoisie, est du vin muscat qui est cuit. On appelle aussi malvoisie, du vin qui vient d'un promontoire de l'Isle de Chio nommé Arvisium. On met aussi au rang des malvoisies le vin de Crete ou de Candie, de Lesbos, Gnidos & autres Isles de la Grece. Du vin bruslé, est celuy qu'on fait bouillir avec du sucre. De l'hypocras, c'est du vin meslé de sucre, de canelle & d'ambre. On appelle aussi du vin de cabaret, du vin frelaté, du vin de coupeaux, plein de colle de poisson, de fiente de pigeon. Un vin de rappé, qui est repassé sur du nouveau ; du vin miellé, qu'on appelle aussi bergerette, & les Medecins oenomeli.

VIN, en termes de Medecine, se dit de plusieurs mixtions & compositions de vin, qu'ils font pour servir de divers remedes, auxquels ils donnent differents noms. Le vin marin, est celuy qu'ils font en jettant de l'eau de mer sur les grappes, quand elles sont dans la cuve. Vin de fleurs de lambrusque, qu'ils appellent vinum oenanthium ; du vin de palmes & de dattes, nommé vinum palmeum ; vin de figues seches, vinum ex aricis factum. Vin de pommes de coin, nommé cydonites, qu'ils font avec des roüelles de coins qu'on laisse tremper dans du moust ou vin doux ; du vin rosat, en laissant des roses trois mois dans du vin ; vin de grenades, qui se fait en pressurant les pepins des grenades ; vin de graine de myrthe, qui se fait en mettant du jus de cette graine pilée sur une certaine quantité d'eau ou de vin ; vin de lentisque, ou de terebenthine, qui se fait avec les branches de ces arbres pilées avec leur fruit, qu'on mesle dans du vin ; du vin de pommes de pin, qu'ils appellent strobilites ; du vin d'hysope, nommé hysopites ; vin aromatisé, nommé aromatites ; du vin poissé, qui se fait de poix & de moust, qu'ils nomment vinum picatum. On en fait aussi avec de la resine de pesse, qui empesche qu'il ne s'aigrisse, quand le raisin n'est pas parvenu à sa maturité, qu'ils nomment resinatum vinum. Il se fait aussi du vin de cedre, & de plusieurs autres arbres & fruits, de genévre, de cyprés, de laurier, de pin, de sapin, de poires, de carrouges, de nefles & de cormes. Il s'en fait aussi de quantité de plantes. Du vin de scille, nommé vinum scilliticum ; vin de navets, qu'ils appellent bunites ; du vin de dictame, de marrube, de thim, de sarriette, de germandrée, de sticas, de betoine, d'origan, de calamenthe, de pouliot, d'auronne, d'oenula campana, de spica nardi, de daucus, de saulge, de panacée, de reglisse, d'ache, de fenouil, d'aneth, de fleur de sel, de thymelea, de bois gentil, d'yve muscate, de mandragore, d'ellebore noir, de scammonée, de gayac, ont la plus-part ne sont plus en usage, mais leurs nous se trouvent dans les anciens Auteurs. Arnauld de Villeneuve a fait un livre particulier de ces vins artificiels.

Le vin d'absynthe est un remede qui se fait avec la grande ou la petite absynthe. On en prend le haut des fleurs, qu'on enferme dans un sacheton ou noüet, & qu'on suspend par le bondon au milieu du vaisseau où est le vin, qui en fermentant tire l'odeur, le goust & les vertus de l'absynthe ; & on l'appelle absynthites.

Le vin emetique, est du vin où on a laissé tremper quelque temps des poudres, du verre, ou du regule d'antimoine, du crocus metallorum, ou de la magnesie opaline. Il ne prend de cette vertu qu'autant qu'il en peut porter, & n'est pas plus fort au bout de trois mois qu'au bout de huit jours. Il purge par haut & par bas.

On appelle marc de vin, ce qui reste du raisin, quand il a passé sous le pressoir. Lie de vin, ce qui reste dans le tonneau, aprés qu'on a tiré le vin à clair ; brandevin, de l'eau de vie ; esprit de vin, de l'eau de vie rectifiée ou distillée plusieurs fois ; impost de vin, les droits d'entrée, gros, huitiesme, &c.

On appelle Marchands de vin, les Taverniers & Cabaretiers ; Courtiers de vin, ceux qui adressent sur l'estappe les acheteurs aux vendeurs ; Jurez Vendeurs de vin, certains Officiers établis sur l'estappe, qui reçoivent les deniers de la vente du vin, & qui en répondent aux Marchands. Les Gourmets sont ceux qui goustent bien le vin, qui jugent de sa bonté & de sa garde ; Crieurs de corps & de vin, ceux qui font la ceremonie des enterrements, & qui alloient autrefois annoncer le prix du vin dans les ruës. On appelle chez le Roy Coureur de vin, celuy qui porte le vin à la suite du Roy.

On appelle un yvrogne un sac à vin : on dit qu'il est sujet au vin, qu'il est pris de vin, que le vin luy sort par les yeux ; & qu'il cuve son vin, quand il dort ; & alors on dit qu'il a un vin de pourceau. On dit qu'il a mauvais vin, qu'il a un vin de lion, quand il bat & querelle tout le monde ; qu'il a un vin de singe, quand il est gay, quand il danse, & quand il folastre, aprés avoir beu ; qu'il a un vin d'asne, quand il devient hebeté ; un vin de cerf, lors qu'il est melancolique, & que les larmes luy sortent des yeux ; un vin de pie, lors qu'il babille & caquette. Vin de Nazaret se dit, lors que le vin sort par les narines à force de rire en beuvant.

VIN, est aussi un petit present qu'on donne aux valets, ou aux compagnons de mestier, pour quelque petit service qu'ils rendent. Les Sergents le demandent aussi dans les ventes à l'encan, & ils disent, A trente livres & le vin. On dit aussi, qu'il faut boire le vin du marché, quand il se fait quelque vente, ou achat entre les gens de basse condition.

On appelle pot de vin, une paraguante, ou un pardessus qu'on donne au delà de la somme principale du marché conclu, & qu'on stipule souvent pour en faire partie.

VIN, se dit proverb. en ces phrases. Un verre de vin avise bien un homme, se dit à ceux qu'on invite à boire avant que de discourir. On dit qu'à bon vin il ne faut point de bouchon, pour dire, qu'on en a le debit assez promptement. On dit d'un homme qui desjeune avant que d'aller à la Messe, qu'il va à la Messe des trepassez, qu'il y porte pain & vin. On dit, Aprés bon vin, bon cheval, pour dire, qu'on fait plus de diligence, quand on a bien repeu. On appelle vin de l'estrier, celuy qu'on boit en montant à cheval. On dit aussi, Le vin trouble ne casse point les dents. On dit qu'un homme a mis de l'eau dans son vin, quand il est plus moderé ou adouci, lors qu'il est revenu de ses emportemens. On dit aussi en méprisant du vin, que c'est du vin de Bretigny, qui fait danser les chévres. On dit que du vin n'a que l'épée & la cappe, lors qu'il est floüet, qu'il a peu de vin, qu'il a peu de force. On appelle aussi du vin à deux oreilles, celuy qui fait secoüer les oreilles ; & du vin à une oreille, celuy qui fait pancher une oreille en signe d'approbation ; on dit que c'est du vin qui se laisse boire.