s. m. Petit animal ou insecte qui vient de corruption des chairs. L'homme mort n'est que vers & que pourriture : il n'est pas si-tost mort, qu'il est tout grouillant de vers. Malherbe a dit des Rois :

Et dans ces grands tombeaux, où leurs ames hautaines

Font encore les vaines,

Ils sont mangez des vers.

Cette viande est trop mortifiée, elle est toute pleine de vers. Les vers s'engendrent souvent de chieures de mouches. En Latin vermis.

VER, se dit aussi des animaux qui s'engendrent dans des fruits. Les prunes, les framboises, les bigarreaux sont fort sujets aux vers. Les cerises & autres fruits acides, ni le sel, ne craignent point les vers. Les bleds enfermez se convertissent en vers longs d'un pouce. Le charençon est une espece de ver qui s'engendre dans le grain du bled, en Latin curculio. Il n'y a gueres de plante qui n'ait son ver, sa chenille, son papillon, comme a observé pendant 40. ans le curieux Fleuriste Morin : & generalement on peut dire de tous les corps, qu'ils ont un certain ver & un principe de corruption.

VER, se dit aussi de ceux qui s'engendrent de la corruption des aliments ou des humeurs dans les corps vivants. Il s'engendre des vers dans les veines, dans les boyaux. Une infinité d'enfants meurent des vers, si on ne leur donne de la barbotine, ou de la poudre à vers. Il y a aussi de petits vers dans le foye de quelques animaux, & sur tout dans le foye des moutons, dont on voit la description dans le Journal des Sçavants de l'année 1668. Mr. Redi pretend que les vers qui s'engendrent dans les intestins, se forment des oeufs de quelque insecte mêlez avec les aliments.

VER À SOYE, est un ver qui produit la soye, & qui est une des merveilles de la nature. Il se nourrit de feuilles de meurier blanc. Il devient papillon, & puis il s'enferme dans une coque qu'on devide, dont on fait la soye, au dedans de laquelle est une feve qui contient une infinité d'oeufs qui esclosent au printemps. On a observé que le dedans du ver à soye est une chaisne de coeurs attachez les uns aux autres. Les vers à soye de la Chine sont des especes d'araignées, en Latin ser. Le nostre s'appelle bombyx. Il y a des vers à la Chine qui font de la cire.

VER, se dit aussi de la cochenille, qui est une espece de ver plat & rond comme une punaise, qui est gris, quand il est sec, & qui teint en escarlate. Quelques-uns croyent qu'il vient aux feuilles de l'yeuse, espece de chesne, en Latin coccus ; & qu'on trouve des vers semblables sur les feuilles de la pimprenelle.

VER LUISANT, est un certain ver qu'on voit particulierement en automne, qui est brillant la nuit comme une chandelle, qui est grisastre, bleu & verd. Il y a des vers luisants dans les huistres, rouges ou blancheastres, longs de cinq ou six lignes, & gros comme un petit fer d'aiguillette. Ils ont 25. pieds de chaque costé, & le dos comme une anguille escorchée ; & il y en a de plusieurs especes, On l'appelle en Latin cicindula, sic dicta, quòd volans candet, id est lucet ; en Grec pyrilampis ou lampyris.

VER, se dit aussi d'un insecte qui vit dans la terre, qui rampe sur la terre, qui est menu, long & sans os. Il y a des vers qui n'ont point de pieds ; d'autres qui en ont six, & d'autres un plus grand nombre. On fait de l'huile de vers, qui est bonne à plusieurs choses. On fait aussi une trempe d'acier qui est tres-forte avec de l'huile de vers. En Latin lumbrici. Les Naturalistes les appellent intestina terrae. Ils sortent d'un oeuf, & aprés ne souffrent plus aucun changement.

VER, se dit aussi d'une certaine tigne, ou petit animal qui s'engendre dans les estoffes, ou dans les bois qui sont vieux. Le ver se met dans les tapisseries d'Auvergne, parce que les laines n'en ont pas esté bien degraissées. On met des chandelles dans le drap qu'on enferme, pour empêcher que les vers ne s'y mettent. Ce bois, ces étoffes ne valent rien, elles sont picquées de vers. En Latin tinea, teredo. Les vers qui se mettent dans les navires, & que les Latins nomment teredines, sont un peu plus gros que les vers à soye, fort tendres & luisants d'humidité. Ils ont la teste noire & fort dure, & rongent incessamment, & trouënt les planches & membres d'un vaisseau. Le Journal des Sçavants de l'an 1668. fait mention de certains vers qui rongent des pierres. On a découvert par le microscope, qu'ils sont noirs, longs d'environ deux lignes, larges de trois quarts de ligne, & enfermez dans une coque grisastre. Ils ont trois pieds de chaque costé qui ressemblent à ceux d'un pou, & sont proche de la teste, laquelle est fort grosse. On voit dans leur gueule quatre especes de mantibules en croix qu'ils remuent continuellement, qu'ils ouvrent & ferment comme un compas à quatre branches. Ils ont dix yeux fort noirs & ronds. Le mortier est aussi mangé par une infinité de petits vers gros comme des mites de fromage, qui sont noirastres, & ont quatre pieds assez longs de chaque costé : ce qu'on ne doit point trouver estrange, puis qu'on voit des branches de corail & les plus beaux coquillages percez de vers ; & qu'on a veu même un morceau de verre vermoulu, & qu'on a tiré plusieurs vers de ses trous.

On appelle figurément ver, le remords de la conscience, parce qu'il ressemble à un ver qui nous ronge le coeur incessamment.

VER, se dit proverbialement en ces phrases. Il est nud comme un ver. On dit aussi d'un homme sans biens, sans pouvoir, que c'est un miserable ver de terre. On dit aussi, qu'on l'escrasera comme un ver, pour dire, qu'il est facile de le destruire. On dit aussi, qu'un ver se recoquille, se rebeque, quand on le presse, pour dire, qu'il n'y a point de si petit animal qui ne tâche à se deffendre.