s. f. Fil extremement doux & delié, qui sert à faire de belles estoffes pour les gens de condition. Les Anciens ont crû que la soye venoit d'une espece d'araignée, ou d'escarbot, qui la tiroit de ses entrailles, & l'entortilloit avec les pieds autour de petites verges ou branches d'arbres ; & nommoient cet insecte Ser, du nom de Seres, peuples de Scythie qui le nourrissoient. Ils croyoient qu'il vivoit cinq ans, & se nourrissoit de panis & d'autres menus legumes. Mais ce ver a peu de rapport avec celuy qu'on nomme maintenant ver à soye ; car celuy-cy tous les ans meurt enveloppé d'un cocon jaune, qui se devide en menus filets fort deliés qui font la soye.

La soye d'Orient est une plante qui a des feuilles peu larges, hautes d'un pied, avec un aiguillon comme celuy des artichauds. Son fruit est une gousse parfaitement ressemblante à un perroquet qui est verd, ayant des pieds, une tête, & une queuë comme luy, & de petits cercles jaunes vers la tête qui representent fort bien ses yeux. Il contient une matiere extremement blanche & deliée, qu'on file, & qui est de la soye. Sa graine est mêlée parmi, qui est deux ans à venir en ces quartiers, où on en a apporté par curiosité.

La soye cruë est celle qu'on tire sans feu, & qu'on devide sans faire bouillir le cocon, qu'on incise pour en faire sortir le ver quatre ou cinq jours aprés qu'il est parfait. On en fait des gazes & autres étoffes. Cette soye est fort pure, pourveu qu'on en separe la derniere enveloppe exterieure, & la pellicule qui se trouve joignant le ver. Il est deffendu de mêler la soye cruë avec la soye cuitte. La soye cuitte est celle qu'on a fait bouillir pour la devider plus facilement, comme celle dont on fait les velours, satins, taffetas, damas, brocards, crespes, & autres étoffes. La soye étoit si precieuse du temps des Empereurs, qu'on la vendoit au même poids de l'or. Il étoit deffendu de porter des habits tout de soye, comme on voit au titre du Code de vestibus holosericis. La serge de soye est une étoffe toute de soye, croisée obliquement. Les étoffes toute de soye, comme les velours, pannes, gros de Tours, ou de Naples, poux de soye, satins, damas, venitiennes, serges de soye, tabis à fleurs, taffetas façonnés, doivent avoir une demi-aune moins un 24. de largeur. Les soyes de Messine sont les meilleures pour les étoffes pleines & unies, parce qu'elles prennent une belle teinture. Les soyes de Perse & de la Chine sont blanches & tres-fines. Les plus belles soyes de Syrie sont celles de Luges, Chouf, & Billedun. On appelle des soyes greges, & en matasse, des soyes qui sortent dessus le cocon, c'est à dire, qui sont par pelotes, comme le chanvre & le lin avant que d'être filés ; & on en trafique en balle. On appelle bourres, & strasses de soye, de grosses soyes qu'on fait passer souvent pour de bonnes. On appelle soyes apprestées, celles qui sont filées & moulinées, prestes à mettre en teinture, qu'on appelle autrement organsin de Boulogne.

SOYE, se dit aussi par antiphrase, du poil rude des porcs & des sangliers ; & quelques-uns l'ont dit du crin de cheval. On appelle des pieds de cochon assaisonnez, des bas de soye. On dit aussi des chiens barbets & épagneuls qui ont du poil doux & long, qu'ils ont de belles soyes. Ce mot vient du Latin setum. On a appellé la queuë de cheval equisetum.

SOYE, se dit figurément en Morale, des choses douces & agreables. Il ne faut parler aux Grands qu'avec des paroles de soye. Les Poëtes disent en souhaittant une heureuse vie à leur Mecenas, Que tes jours soient filés d'or & de soye.

SOYE, est aussi une pointe de fer qui entre dans la poignée d'une épée pour la joindre avec la lame.